Dans le film All Eyez On Me il y a un passage où le très regretté rappeur Tupac se trouve devant la cours qui est censée déterminer sa peine pour l’agression sexuelle dont il a été accusé en 1993. Il s’adresse au juge et déclare « Vous ne me regardez pas : l’homme, la personne ». Cette remarque se rapproche de la fin d’un discours sur l’incapacité du juge et de la cour, de le voir comme autre chose qu’un rappeur « gangsta » noir et tatoué. Le film qui est presque totalement dépourvu de révélation, est en fait une leçon de deux heures sur la façon dont nous choisissons de nous souvenir de Tupac.
Dans la mesure où nous voyons Tupac maintenant comme un poète et prédicateur, comme un révolutionnaire ou un martyr, comme une icône du rap, notre vision semble isoler l’héritage de l’homme. Il est « une histoire d’ambition, de violence, de rédemption et d’amour », c’est ce que la rappeur a déclaré lui même dans un film d’archive, utilisé pour le documentaire de 2003 Tupac : Résurrection. « Mesurez un homme par ses action, du début à la fin ». Pourtant, peu de représentations posthumes suivent ces précieux conseils. Des images et des sons, des entretiens sont utilisés pour immortaliser Tupac dans un cadre spécifique : Tupac le révolutionnaire, Tupac l’icône du rap, ou encore Tupac le poète. Ils ne sont jamais rendus en trois dimensions, et ils ne l’humanisent jamais vraiment. Il était bien évidemment toute ces choses à la fois, mais il était surtout fidèle à ses émotions.
L’utilité principale d’un biopic c’est un peu la création de mythe : dramatiser des situations, nous montrer comme une idole se construit. Mais quand une vie a été disséquée comme celle de Tupac, tout ce qui reste c’est de partager les idées sur l’homme, qui il était vraiment sous cette renommée de grande ampleur. All Eyez on Me fait le contraire, suivant les traces des précédents médias, cette fois-ci en le transformant en martyr. Il a principalement profité du doute qui plane autours de cette affaire controversée d’agression sexuelle. La représentation est modeste, presque diplomatique par rapport à la réalité et n’est exacerbée que par les inexactitudes factuelles qui sont abondantes.
All Eyez on Me réduisent l’existence du rappeur aux titres. Pour la performance finale de Tupac dans le film, il joue Hail Mary, une chanson qui n’a même pas été publiée avant sa mort. Le biopic n’a pas été très bien reçu par les critiques, ainsi que par les proches du rappeur. Les français n’ont malheureusement (ou heureusement du coup) pas encore pu juger eux même puisque aucun distributeurs français ne s’est positionné sur le film. Peut-être incompréhensible quand on pense que Tupac est un artiste légendaire dont la carrière a marqué la culture hip-hop.