MAES OU LE RAP COMME RÉSILIENCE

Louise K Mambi

Poids lourd de la scène Sevranaise, MAES a sorti son premier album « Pure » début décembre après des dizaines de freestyles et deux mixtapes. Franc et d’une simplicité déconcertante pour un artiste au tel succès, le rappeur s’est livré à DA VIBE autour de son enfance, ses premiers pas dans le rap, la prison et sa réussite personnelle. 

Rencontre avec celui qui est passé en quelques années de l’ombre à la lumière. 

Louise K Mambi

Il surgit d’un coup, entièrement vêtu de blanc lui donnant une allure « Pure » comme pour rappeler le titre de son album. Sourire généreux et yeux rieurs, il s’installe tranquillement pour répondre à nos questions. Maes est devenu en quelques mois, une des têtes d’affiches de la scène émergente de Sevran. Il lui aura fallu un tube estival « Billets Verts », et autre à la rentrée en feat avec Booba, « Madrina » pour s’installer confortablement et propulser un album très attendu.

Enfant du 93, le jeune rappeur de 23 ans issu d’une famille nombreuse se rappelle d’une enfance joyeuse entourée de ses six frères et sœurs et de ses amis du quartier. Il est baigné très tôt dans la musique. D’abord celle de ses parents, des chansons traditionnelles arabes et de la variété française puis viennent les premiers éveils au rap français bercés aux sons de ses grands frères. Il se rappelle bien de son premier cd acheté au supermarché par sa mère à l’âge de 5/6 ans

« Je demande à ma mère si je peux prendre le cd parce que j’entends mes frères écouter ça.» 

Il ne se voit pas encore dedans mais interroge la manière dont les rappeurs travaillent, cherche à percer le secret de l’écriture : « J’essayais d’écrire des textes pour voir comment ils faisaient(…). Je  tapais « instru » sur youtube à 13 ans et j’essayais, j’écrivais.» Il signe très jeune ses premières tentatives de production, infructueuses mais avec un intérêt qui grandit de plus en plus pour le rap.

À l’école, le jeune homme est plutôt discret, toujours dans la moyenne. À 15 ans viennent les premières bêtises qui mèneront vers d’autres encore plus grosses. « Dès que tu goûtes à ça, tu peux plus retourner travailler pour un smic. En dix jours t’as fais ton smic, en un mois le salaire d’un médecin alors que tu as 16 ans. C’est un vice.» Presque au même moment, il intègre son premier groupe de rap MSR. En compagnie de deux potes de la cité dont il est toujours proche aujourd’hui, il pose ses premiers textes, ses premiers flows. « On s’est toujours suivi, on est toujours proches, ce sont des frères.» Il passe ensuite à LDS, autre groupe avec pour réel objectif de réussir. Naît chez Maes l’envie de percer et de rendre l’appareil à ceux qui l’ont aidé. 

En 2016, la prison arrive, ses projets rap sont freinés mais pas en sommeil. Il continue d’écrire, de composer et s’évertue à transformer un mal en expérience enrichissante. Il profite d’un buzz créé par ses sons balancés sur les réseaux sociaux autour de #liberezmaes, puis #maesliberable, pour faire circuler ses freestyles et ça marche. Quand il sort, il est déjà connu et a déjà convaincu un certain nombre d’auditeurs. Il reste alors pour lui à réparer le regard de sa mère qui a affronté à ses côtés ses erreurs.

« La première fois que j’ai vu ma mère en prison, j’avais honte. Le premier parloir, on a quasiment pas parlé même si elle m’avait ramené à manger…. Je me suis toujours dit rap ou pas rap, faut que je subvienne à ses besoins, et même au delà. Aujourd’hui, elle est grave fière. Maintenant le single d’or, il est dans son salon ! »

Le succès est rapide avec son premier million de vus pour « T.Max 530 » puis frappe un grand coup avec « Billets Verts » (single d’or), même si de l’extérieur, il cache les nombreux sacrifices et heures de travail. « C’est un travail d’endurance. De mon premier texte à 13 ans, mes premiers sons à 14 ans, il y a toujours eu beaucoup de contenu. Il y a vraiment beaucoup de travail derrière. » Un succès qu’il doit à son travail mais qu’il attribue aussi à son équipe « J’ai eu une vrai production derrière moi qui a su exploiter mon talent » mais également à quelques bon coups de pouce, tel que celui de Booba qui partage ses sons depuis 2015 et avec qui il a sorti un feat explosif « Madrina ».

Aujourd’hui, Maes se consacre entièrement à sa passion. Il n’a pas de nouveaux amis, et fuit les mondanités et les copinages : « Je fais attention, mes amis je les connaissais avant le rap, j’ai une base solide et la garde ». Il partage  une bienveillance pleine d’humilité et d’entraide pour ceux qui « ont toujours été là ».

Niveau style, il développe plusieurs facettes de son art, traçable sur son premier album « Pure » : des sons mélodieux, des intrus plus sombres, des kicks et des morceaux un peu plus chantés. Les nombreux bons retours (public et média) sur son album l’encourage à se concentrer entièrement sur sa musique et l’étonne même encore quelques fois : « J’étais en showcase à Lyon, le public entier chantait mes sons. J’étais vraiment surpris. Ça fait vraiment très plaisir ! »

Prochain défi pour le rappeur : la scène. Fort de quelques showcases et de l’expérience d’une première partie pour 13 block, il attend impatiemment le 13 Février, sa date de concert à la Machine du Moulin Rouge « Je suis pressé même si le jour même je serai pas pressé ! J ‘aime le contact, j’ai hâte! ». Un défi qu’il saura sans aucun doute relever avec sa tranquillité légendaire !